Aujourd’hui, comme souvent, je me rends à Vieux-Mareuil en partant de Brantôme, car je vais m’arrêter juste avant le bourg, à droite, devant ce qui fut le berceau de la famille : Un relais de poste du XVII ème siècle nommé ”Les Chambarrières” avant d’être rebaptisé ”La Charrue” par les propriétaires actuels.
Mes ancêtres se succédèrent donc ici, depuis Jean Desmignot de Fonbonne sieur de Fougères, au nom duquel je possède un document daté de 1703. La famille donna par deux fois un maire à cette commune au XIX ème siècle
C’est dans l’église de Vieux-Mareuil que s’unirent mes grands-parents. Les terres alentour étaient liées à l’histoire familiale.
Je contourne Mareuil-sur-Belle, où plane encore dans le subconscient l’ombre de la guillotine qui s’abattit sur mon aïeule, pendant la Terreur.
Mais je m’arrête devant la château construit au XV ème siècle par Geoffroy de Mareuil. Aujourd’hui, il recèle des trésors du XVIII ème siècle et de l’Empire. Le duc de Montebello lui-même assure la visite, discourant au milieu d’innombrables objets, tableaux, livres et meubles dont il est l’héritier.
En homme lettré et esthète averti, il finit toujours sa visite – qui dure une heure ou deux selon ses interlocuteurs – par la déclamation de poèmes et, le plus souvent, des ”Greguerias” de Ramon Gomez de la Serna, ce ‘joueur de mots” comme le qualifient certains critiques. Ce poète espagnol est né à Madrid en 1888 mais s’est exilé à Buenos Aires en 1936. Il semble avoir souvent les faveurs de notre hôte. Mais la visite se termine lorsque Madame se joint à nous, tout en diffusant depuis une pièce voisine des airs d’opéra.
J’ai envie de leur offrir ces vers d’un de leurs compatriotes, le troubadour Arnaud de Mareuil :
“Dame, la plus noble créature
jamais façonnée par la nature,
…
plus belle que jour de mai,
soleil de mars, ombre d’été,
rosée de mai, pluie d’avril,
fleur de beauté, écrin d’honneur….”
Dès lors, je reste sur la fibre artistique pour poursuivre jusqu’à Gabardeaux, propriété du cousin germain de ma grand-mère. Mon grand-père aimait l’y retrouver pour des parties de chasse.
Le dernier descendant propriétaire des lieux fut leur fils Jacques Démignot, styliste chez Givenchy.
Si ce dernier m’impressionnait toujours par son élégance, il me charma par son innovation dans la déclinaison des tons choisis pour ses salles de bains, tout comme pour ses parterres de fleurs : le bleu et le mauve faisaient leur apparition, reléguant le rose et le rouge aux massifs plus banals.
Son goût pour la modernité l’avait poussé à céruser une commode Louis XV au grand émoi de ma grand-mère : “Mon pauvre Jacques ! Se plaignit-elle, tu as complètement abîmé ce meuble !!”
Il lançait une tendance, incomprise alors, mais que reprirent des antiquaires quelques décennies plus tard.
Lorsqu’il venait déjeuner à l’improviste à Saint Martial, c’était toujours un moment magique.
Je me souviens de lui, un jour, descendant de voiture où il avait laissé somnoler son lévrier qui ne le quittait pas, s’exclamant devant le rosier qui s’épanouit au printemps devant la tonnelle : “Cette rose thé est vraiment belle : sa couleur, son parfum, tout cela m’inspire…”
Je le regardai sans bien comprendre.
Et pourtant, c’est à lui que je pense chaque année en taillant ce rosier.
Agnès DESAGES
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